Fractale
On appelle figure fractale ou "fractale" par substantivation de l'adjectif, une courbe ou surface de forme irrégulière ou morcelée qui se crée en suivant des règles déterministes ou stochastiques impliquant une homothétie interne.
Définitions :
- Objet géométrique défini par un ensemble de propriétés précises, dont celle d'être autosemblable, c'est-à-dire que le tout est comparable à l'une de ses parties; Sert à désigner une forme dont l'aspect ne change pas quelque soit l'échelle à laquelle on observe celle-ci (source : fr.wiktionary)
On appelle figure fractale ou "fractale" par substantivation de l'adjectif (ou encore en anglais fractal), une courbe ou surface de forme irrégulière ou morcelée qui se crée en suivant des règles déterministes ou stochastiques impliquant une homothétie interne. Le terme «fractale» est un néologisme créé par Benoît Mandelbrot en 1974[1] à partir de la racine latine fractus, qui veut dire brisé, irrégulier (fractales n. f). Dans la «théorie de la rugosité» développée par Mandelbrot, une fractale sert à désigner des objets dont la structure est liée à l'échelle.
Ce terme était au départ un adjectif : les objets fractals (selon un pluriel constitué sur l'exemple de "chantiers navals"). Les fractales sont définies de manière paradoxale, en référence aux structures gigognes dont ils forment des cas spécifiques : «Les objets fractals peuvent être envisagés comme des structures gigognes en tout point –et pas uniquement en un certain nombre de points, les attracteurs de la structure gigogne classique. Cette conception hologigogne (gigogne en tout point) des fractales implique cette définition tautologique : un objet fractal est un objet dont chaque élément est aussi un objet fractal»[2]. Malgré les apparences, ce type de définitions de nature récursive n'est pas uniquement théorique mais peut concerner aussi des concepts usuels : un ancêtre est un parent ou un ancêtre d'un parent, un multiple est un composé d'un nombre ou d'un multiple de ce nombre, un escalier débute ou prolonge un escalier, une dynastie inaugure ou prolonge une dynastie, etc.
Caractéristiques
Un objet fractal possède au moins l'une des caractéristiques suivantes :
- sa dimension de Hausdorff est strictement supérieure à sa dimension topologique. Cette caractéristique est le plus souvent prise comme définition même d'un objet fractal. Pour exprimer la chose autrement, un réseau d'irrigation est un déploiement de lignes («en 1D») qui offre des caractéristiques commençant à évoquer une surface («en 2D»). La surface du poumon («en 2D») est repliée en une sorte de volume («en 3D»). De façon imagée, les fractales se définissent par une sorte de dimension non-entière.
- il a des détails identiques à des échelles arbitrairement petites ou grandes ;
- il est trop irrégulier pour être décrit efficacement en termes géométriques respectant les traditions ;
- il est précisément ou statistiquement autosemblable, c'est-à-dire que le tout est comparable à une de ses parties ;
Domaines de validité
Les figures fractales n'ont pas à satisfaire l'ensemble des propriétés mentionnées ci-dessus pour servir de modèles. Il leur suffit de réaliser des approximations convenables de ce qui intéresse dans un domaine de validité donné (le livre fondateur de Mandelbrot Les Objets fractals en donne une grande variété d'exemples). La taille des alvéoles du poumon, par exemple, taille à partir de laquelle ce dernier cesse de se subdiviser de façon fractale, est liée à la taille du libre parcours moyen de la molécule d'oxygène à température du corps.
La dimension utilisée est celle de Hausdorff, et on observe qu'elle correspond à une caractéristique nouvelle des surfaces irrégulières. On connait les plages de validité des dimensions de Hausdorff observées sur Terre pour les montagnes, les nuages, etc.
Des exemples de figures fractales sont apportés par les ensembles de Julia et de Mandelbrot, la fractale de Lyapunov, l'ensemble de Cantor, le tapis de Sierpinski, le triangle de Sierpinski, la courbe de Peano ou le flocon de Koch. Les figures fractales peuvent être des fractales déterministes ou stochastiques. Elles apparaissent fréquemment dans l'étude des systèmes chaotiques.
Les figures fractales peuvent être réparties en trois grandes catégories :
- Les systèmes de fonctions itérées. Ceux-ci ont une règle de remplacement géométrique fixe (la totalité de Cantor, le tapis de Sierpinski, le triangle de Sierpinski, la courbe de Peano, le flocon de Koch) ;
- Les fractales définies par une relation de récurrence en chaque point dans un espace (tel que le plan complexe). Des exemples de ce type sont les ensembles de Mandelbrot et la fractale de Lyapunov ;
- Les fractales aléatoires, générées par des processus stochastiques et non déterministes, par exemple les paysages fractals.
De toutes ces figures fractales, seules celles construites par des dispositifs de fonctions itérés affichent généralement la propriété d'autosimilitude, signifiant que leur complexité est invariante par changement d'échelle.
Les fractales aléatoires sont les plus utilisées dans la pratique, et peuvent servir à décrire de nombreux objets extrêmement irréguliers du monde réel. Les exemples incluent des nuages, les montagnes, les turbulences de liquide, les lignes des côtes et les arbres. Les techniques fractales ont aussi été utilisées dans la compression d'image fractale, de même que dans énormément de disciplines scientifiques.
Dimension fractale
La dimension d'une ligne droite, d'un cercle et d'une courbe régulière est de 1. Une fois fixé une origine et un sens, chaque point de la courbe peut être déterminé par un nombre, qui définit la distance entre l'origine et le point. Le nombre est pris négativement s'il faut se déplacer dans le sens opposé à celui choisi au départ.
La dimension d'une figure simple dans le plan est de 2. Une fois un repère défini, chaque point de la figure peut être déterminé par deux nombres. La dimension d'un corps simple dans l'espace est de 3.
Une figure telle qu'une fractale n'est pas simple. Sa dimension n'est plus aussi facile à définir et n'est plus nécessairement entière. La dimension fractale, plus complexe, s'exprime avec la dimension de Hausdorff.
Lorsque la fractale est constituée de répliques d'elle-même en plus petit, sa dimension fractale peut se calculer comme suit :
où la fractale de départ est constituée de n exemplaires dont la taille a été réduite d'un facteur h (pour homothétie).
Quelques exemples :
- Un côté du flocon de Koch est constitué de n = 4 exemplaires de lui-même réduit d'un facteur h = 3. Sa dimension fractale vaut :
- Le triangle de Sierpinski est constitué de n = 3 exemplaires de lui-même réduit d'un facteur h = 2. Sa dimension fractale vaut :
- Le tapis de Sierpinski est constitué de n = 8 exemplaires de lui-même réduit d'un facteur h = 3. Sa dimension fractale vaut :
Une liste bien plus longue se trouve sous : Liste de fractales par dimension de Hausdorff.
Objets fractals dans la nature
Des formes fractales approximatives sont aisément observables dans la nature. Ces objets ont une structure autosemblable sur une échelle étendue, mais finie : les nuages, les flocons de neige, les montagnes, les réseaux de rivières, le chou-fleur ou le brocoli, et les vaisseaux sanguins.
Les arbres et les fougères sont de nature fractale et peuvent êtres modélisés par ordinateur avec algorithme récursif comme les L-Systems. La nature récursive est évidente dans ces exemples ; la branche d'un arbre ou la fronde d'une fougère sont des répliques miniatures de la totalité : pas semblables, mais de nature identique.
La surface d'une montagne peut être modélisée sur ordinateur en utilisant une fractale : prenons un triangle dans un espace tridimensionnel dont nous connectons les milieux de chaque côté par des segments, il en résulte quatre triangles. Les points centraux sont ensuite déplacés aléatoirement vers le haut ou le bas, dans un rayon défini. La procédure est répétée, diminuant le rayon de moitié à chaque itération. La nature récursive de l'algorithme garantit que le tout est statistiquement comparable à chaque détail.
Enfin, certains astrophysiciens ont remarqué des similitudes dans la répartition de la matière dans l'Univers à six échelles différentes. Les effondrements successifs de nuages interstellaires, dus à la gravité, seraient à l'origine de cette structure (partiellement) fractale. Ce point de vue a donné naissance au modèle de l'univers fractal, décrivant un univers basé sur les fractales.
Domaines d'application
Les domaines d'application des fractales sont particulièrement nombreux, on peut citer surtout[3]
- en biologie, répartition des structures des plantes, bactéries, feuilles, branches d'arbres, ..
- en géologie, étude du relief, côtes et cours d'eau, structures de roches, avalanches...
- en paléontologie, loi de puissance des apparitions et extinctions d'espèces
- en morphologie animale, structures des invertébrés, plumes d'oiseaux, ...
- en médecine, structure des poumons, intestins, battements du cœur
- en météorologie, nuages, vortex, banquise, vagues scélérates, turbulences, structure de la foudre
- en volcanologie, prévision d'éruptions volcaniques, tremblements de terre
- en astronomie avec la description des structures de l'univers, cratères sur la Lune, répartition des exoplanètes et des galaxies...
- en sciences humaines, structure urbaine, évolution de la démographie
- en économie, prévision des krachs boursiers
- dans les arts, art graphiques bien sur , mais également en littérature, en musique, au cinéma... Dans La Dramaturgie, par exemple, Yves Lavandier démontre que la théorie fractale s'applique à merveille aux mécanismes du récit. La forme simple protagoniste-objectif-obstacles se retrouve à différentes échelles : la série, l'œuvre unitaire, l'acte logistique, l'acte dramatique, la séquence, la scène, jusqu'à certains dialogues. C'est la spécificité de chaque composant et la combinaison de milliers de formes simples qui donnent à chaque récit son caractère unique et son apparente originalité.
Tous ces domaines - et bien d'autres - peuvent bénéficier de la description et d'une modélisation en termes fractals des phénomènes associés.
Galerie de photos
Ensemble de Julia en 0.3 + 0.5i |
Suite qui tend vers le flocon de Koch |
Informatique
- Fractint est un ensemble logiciel libre, gratuit et open source conçu pour tracer de nombreux types de fractales.
- Sterling est un générateur de fractales gratuit pour Windows.
- XaoS est un outil interactif francophone donnant la possibilité d'une découverte à la fois technique et poétique des fractales.
- Qosmic est un logiciel s'intéressant à l'édition de flammes fractales, les rendus sont générés de manière algorithmique.
- Méthodes informatiques de calcul
- Système de fonctions itérées (IFS).
- Jeu du chaos
- Système de Lindenmayer ou L-System.
- Méthodes topologiques.
- Algorithme Diamant-Carré
Utilisations industrielles
Surface spécifique de Blaine : la finesse de broyage d'un ciment est exprimée en termes de surface spécifique (cm²/g) et mesurée par la méthode de Blaine, dite de perméabilité à l'air, utilisant la loi de Darcy, et la loi de Kozeny-Carman qui établit que la traversée d'un lit de granules par un fluide est affectée par la surface spécifique des granules. Ainsi, en calculant la durée que met un gaz sous pression à traverser un volume donné de granules, on en déduit la surface des granules. Plus le broyage est fin, plus la surface calculée est importante. Cette expérience ayant lieu dans un volume déterminé, on peut imaginer obtenir une surface développée illimitée en broyant encore plus finement le ciment. Il s'agit là d'une utilisation industrielle d'un modèle expliqué par les mathématiques fractales (un objet de dimension n de mesure finie, borné par une frontière de dimension n − 1, de mesure tendant vers l'infini).
Notes et références
- 50 ans après Einstein un savant élucide les mystères de l'univers, Sciences et vie n°936, septembre 1995, page 51.
- Le Trésor des Paradoxes, Philippe Boulanger & Alain Cohen, Éd. Belin, 2007.
- Le monde des fractales, Jacques Dubois & Jean Chaline
Annexes
Bibliographie
- Kenneth Falconer, Fractal Geometry, 1990, John Wiley & Son Ltd. ISBN 0-471-92287-0
- Benoît Mandelbrot, The Fractal Geometry of Nature, 1982, W. H. Freeman & Co. ISBN 0-7167-1186-9. Trad. : Les objets fractals. Forme, chance et dimension, Flammarion, 2° éd. 1984.
- Heinz-Otto Peitgen, The Science of Fractal Images, 1988, Springer Verlag, ISBN 0-387-96608-0.
- Heinz-Otto Peitgen, Fractals for the classroom, New York, Springer Verlag, 1993.
- Michæl F. Barnsley, Fractals Everywhere, Morgan Kaufmann. ISBN 0-12-079061-0
- Bernard Sapoval, Universalités et fractales, Flammarion, coll. Champs.
- Jacques Dubois & Jean Chalin, Le monde des fractales, 2006, Ed Ellipses, ISBN 978-2-7298-2782-3.
Liens externes
- (en) Benoit Mandelbrot, Cours sur les fractales
- Catégorie chaos et fractales de l'annuaire dmoz
- Gecif. net - Exposition de 100 000 images fractales
- Mandelbulb : The Unravelling of the Real 3D Mandelbrot Fractal (fractales en 3D)
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"Exemple de fractale." L'image ci-contre est extraite du site blueman.name Il est possible que cette image soit réduite par rapport à l'originale. Elle est peut-être protégée par des droits d'auteur. Voir l'image en taille réelle (1024 × 768 - 259 ko - jpg)Refaire la recherche sur Google Images |
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