Moiré

Le moiré est un effet de contraste changeant avec la déformation d'un objet, indépendamment des effets d'ombre. Le nom vient du mot arabe mohair.


Catégories :

Science des matériaux - Textile - Imprimerie - Optique géométrique

Définitions :

  • Perturbation de l'image apparaissant comme une superposition d'une fine trame de lignes parallèles sur l'image. Le moirage est le plus souvent dû à un signal pertubateur périodique qui s'ajoute au signal vidéo.... (source : motiongraphic)
Móvil (Mobile, Eusebio Sempere, 1972)  ; sculpture de plein air exploitant l'effet de moiré, Madrid

Le moiré est un effet de contraste changeant avec la déformation d'un objet, indépendamment des effets d'ombre. Le nom vient du mot arabe mohair. On parle fréquemment du moiré d'une étoffe (par exemple de la soie). On peut obtenir un effet identique en superposant deux voiles à maille régulière, ou bien quand on observe deux grillages l'un derrière l'autre, ou encore deux rambardes de pont, à une certaine distance.

En général, le moiré est une figure composée de lignes sombres et claires résultant de la superposition de deux réseaux (ensemble de lignes globalement parallèles). Il s'agit en fait d'un phénomène d'interférences spatiales entre les deux réseaux. Ce phénomène est parfois utilisé pour analyser la déformation d'un objet ; il permet aussi d'expliquer le phénomène de tramage qu'on a quand on numérisescanne») une image composée de points (comme une photo de quotidien), ou bien l'effet étrange produit par une chemise à rayures à la télévision (superposition de la trame de la chemise et de la trame de l'écran).

Réseaux parallèles de pas différent

Approche géométrique

Moiré de réseaux parallèles : les réseaux se recouvrent partiellement à mi-hauteur de la figure

Considérons deux réseaux constitués de lignes parallèles équidistantes, par exemple verticales. Le premier réseau a un pas p, le second a un pas pp, avec δp>0.

Si nous faisons coincider les traits les plus à gauche des réseaux, le décalage entre les traits des deux réseaux s'accentue quand on va vers la droite. Au bout d'un certain nombre de traits, les deux réseaux seront en opposition : les traits du deuxième réseau seront entre les traits du premier réseau. De loin, on va par conséquent avoir une impression de clair quand les traits des deux réseaux sont juxtaposés (il y a du blanc entre les traits), et une impression de sombre quand les traits sont en opposition.

La première ligne sombre apparaît quand le décalage est p/2. Le trait n du second réseau est décalé de n·δp comparé au trait n du premier réseau. La première ligne sombre apparaît par conséquent pour

n·δp = p/2

soit

n = \frac{p}{2 \delta p}.

La distance d séparant une ligne sombre d'une ligne claire est donc

d = n \cdot p = \frac{pˆ2}{2 \delta p}

la distance séparant deux lignes sombres, qui est aussi la distance séparant deux lignes claires, est

2d = \frac{pˆ2}{\delta p}

On voit de cette formule que :

Bien sûr, quand δp = 0, on a une figure uniforme, sans variation de contraste.

Le principe du moiré est en fait identique au vernier.

Approche sinusoïdale

Battements d'interférence selon l'endroit à un instant donné, pour une différence de nombre d'onde de 1 %

Si on ne considère plus des réseaux de lignes de fort contraste, mais des réseaux transparents ayant un contraste I variant de manière continue selon une sinusoïde

\mathrm{I}_1(x) = \mathrm{I}_0 \cdot \sin (2\pi \cdot k_1 \cdot x)
\mathrm{I}_2(x) = \mathrm{I}_0 \cdot \sin (2\pi \cdot k_2 \cdot x)

(les pas sont respectivement de p1 = 1/k1 et p2 = 1/k2), l'intensité quand on superpose les deux réseaux est alors

\mathrm{I}(x) = \mathrm{I}_0 \cdot ( \sin (2\pi \cdot k_1 \cdot x) + \sin (2\pi \cdot k_2 \cdot x) )

soit, selon la formule de la somme de deux sinus dérivée des formules d'Euler :

\mathrm{I}(x) = \mathrm{I}_0 \cdot 2 \cos \left ( 2\pi \frac{(k_1-k_2)}{2} \cdot x \right ) \cdot \sin \left ( 2\pi \frac{(k_1+k_2)}{2} \cdot x \right )
Recouvrement de deux films ayant une densité de gris sinusoïdale de longueur d'onde un peu différente

On voit par conséquent que l'intensité résultante se compose d'une sinusoïde ayant une «fréquence spatiale» (nombre d'onde) élevée qui est la moyenne des fréquences spatiales des deux réseaux, et d'une sinusoïde ayant une fréquence spatiale faible qui est la moitié de la différence des fréquences spatiales des deux réseaux. Cette deuxième composante est une «enveloppe» pour l'autre sinusoïde. La longueur d'onde λ de cette composante est l'inverse de la fréquence spatiale

\frac{1}{\lambda} = \frac{k_1 - k_2}{2} = \frac{1}{2} \cdot \left ( \frac{1}{p_1} - \frac{1}{p_2} \right )

soit si on pose p1 = p et p2 = pp :

\lambda = 2\frac{p_1 p_2}{p_1 - p_2} = 2\frac{pˆ2}{\delta p} + p.

Les zéros de cette enveloppe sont espacés de λ/2, et les maxima d'amplitude en valeur absolue sont espacés aussi de λ/2 ; on retrouve par conséquent le résultat de l'approche classique, à un écart de p/2 près qui correspond à l'incorrectitude de position du trait sombre selon qu'on considère un trait du réseau 1 ou du réseau 2. Cette erreur est négligeable si δp << p.

Ce phénomène est comparable à la stroboscopie temporelle, ou à la production de battements sonores.

Réseaux non parallèles de même pas

Moiré de désorientation
Notations utilisées pour le calcul

Considérons deux réseaux de même pas p, mais désorientés d'un angle α. De loin, on voit aussi apparaître des lignes sombres et claires : les lignes claires correspondent aux lignes des nœuds, c'est-à-dire aux lignes passant par les points d'intersection des deux réseaux.

Si on considère une «maille du filet», on voit que cette maille est un losange : c'est un parallélogramme dont les côtés valent d = p/sin α (on a un triangle rectangle d'hypoténuse d et dont le côté opposé à l'angle α vaut p).

Les lignes claires correspondent à la petite diagonale du losange. Comme les diagonales sont les bissectrices des côtés adjacents, on en déduit que la ligne claire fait un angle α/2 comparé à la perpendiculaire de chacun des réseaux.

D'autre part, l'espacement entre deux lignes claires est la moitié D de la grande diagonale. Cette grande diagonale 2D est l'hypoténuse d'un triangle rectangle dont les côtés de l'angle droit valent d (1+cos α) et p. Selon le théorème de Pythagore, on a :

(2D) 2 : d2 (1+cos α) 2 + p2

soit

(2D)ˆ2 = \frac{pˆ2}{\sinˆ2 \alpha}(1+ \cos \alpha)ˆ2 + pˆ2
= pˆ2 \cdot \left ( \frac{(1 + \cos \alpha)ˆ2}{\sinˆ2 \alpha} + 1\right )

soit

(2D)ˆ2 = 2 pˆ2 \cdot \frac{1+\cos \alpha}{\sinˆ2 \alpha}
Incidence de l'angle

Si α est particulièrement petit (α << 2p), on peut faire les approximations suivantes :

sin α ≈ α
cos α ≈ 1

soit

Dp / α

α étant exprimé en radians On voit que plus α est faible, plus les lignes sont écartés ; quand les deux réseaux sont parallèles (α = 0), l'écart des lignes est «illimité» (il n'y a pas de ligne).

On a par conséquent deux manières de déterminer α : par l'orientation des lignes claires et par leur espacement

α ≈ p / D

Si on choisit de mesurer l'angle, on a une erreur finale proportionnelle à l'erreur de mesure de l'angle. Si on choisit de mesurer la distance, on a une erreur finale inversement proportionnelle à l'erreur de distance. Donc, pour les petits angles, il vaut mieux se fier à la mesure de distance.

Application à l'extensométrie

Utilisation du moiré en extensométrie : cas de la traction uniaxiale (haut) et du cisaillement pur (bas)  ; les traits du réseau d'origine sont horizontaux dans les deux cas

Le moiré est parfois utilisé en extensométrie : il suffit de tracer un réseau sur la pièce à étudier, et de superposer le réseau de référence au réseau déformé par la déformation de la pièce.

On peut aussi superposer une image holographique de l'objet à l'objet lui-même ; les écarts entre l'image (la référence) et l'objet sont dues à des déformations de l'objet, et ces écarts génèrent des franges claires et sombres.

Voir aussi :

Traction uniaxiale

Considérons une pièce de longueur l sur laquelle on trace un réseau de pas p dont les traits sont perpendiculaires à l'axe de traction.

Sous tension, la pièce a une longueur l· (1+ε), où ε est la déformation (allongement relatif). Le pas du réseau devient p· (1+ε), on a par conséquent δp = p·ε.

On voit que l'espacement entre deux zones sombre vaut :

2d = \frac{p}{\varepsilon}

donc cet espacement sert à déterminer la déformation. Cependant, la mesure de la distance entre deux sombres est imprécise, du fait de la largeur d'une zone. On peut se contenter de compter le nombre N de traits sombres qu'on voit : sur une longueur l, on a

N = \frac{l \cdot \varepsilon}{p}

soit

\varepsilon = N \cdot \frac{p}{l}

La précision est la déformation qui sépare deux apparitions de traits, soit

\Delta \varepsilon = \frac{p}{l}

Cisaillement

Dans le cas du cisaillement pur, il suffit de tracer un réseau perpendiculaire aux forces de scission. Le réseau sur la pièce déformé est alors tourné de l'angle de cisaillement γ comparé au réseau de référence (pièce non déformée).

De même que pour la traction uniaxiale, on peut se contenter de compter le nombre de traits, à conditions que γ soit particulièrement faible, que la pièce soit rectangulaire, et que les forces soient parallèles aux côtés (les lignes claires sont alors presque parallèles aux côtés de la pièce).

Si la largeur de la pièce (perpendiculairement aux forces) est l, alors le nombre de traits N vaut :

N = l / D = l \cdot \gamma / p

soit

\gamma = N \cdot \frac{p}{l}

avec comme ci-dessus une erreur

\Delta \gamma = \frac{p}{l}

Imprimerie

Le phénomène de moirage apparaît aussi en imprimerie par le fait que les quatre couches composant une image quadrichromique sont faites d'un maillage nommé trame dont l'inclinaison est différente pour chaque couleur (0, 15, 45 et 75° par exemple). Dans certaines situations, il arrive que la superposition de deux trames provoque un moiré. On y remédie en augmentant ou diminuant la fréquence de la trame électronique.

Article détaillé : Trame (imprimerie) .

Démoirage

Effet de moiré sur les briques dû au sous-échantillonnage
Différents effets de moiré selon le rapport entre les pixels et les points de l'image initiale

Il est envisageable de diminuer les effets du moiré en appliquant des filtres ou avec quelques astuces. Dans le cas d'une numérisation d'un document, on peut limiter le moiré en tournant l'image. L'échantillonnage ne se faisant plus sur les mêmes axes, l'effet peut être réduit ou augmenté. Le filtrage avec un flou gaussien limite le moiré sans cependant totalement l'éradiquer. Des résultats identiques sont obtenus avec un filtre médian.

Fréquemment, les pilotes des scanneurs sont apportés avec une option pour enlever le moiré. Les algorithmes peuvent être plus ou moins évolués mais généralement, la méthode habituelle consiste à agrandir fortement l'image via une interpolation ainsi qu'à appliquer un flou gaussien sur cette version suréchantillonnée. On peut ensuite diminuer la taille de l'image de façon à ce que les dimensions correspondent à l'original. Un filtre de type «accentuation» peut être appliqué pour relever les détails.

Les filtrages plus avancés profitent du fait que le moiré a une certaine fréquence avec généralement une prédominance dans un axe spécifique. Avec des filtres passe-bande, il est envisageable d'éliminer du spectre les fréquences liées au moiré. Cependant, ce problème reste complexe en pratique car le phénomène est fréquemment non-linéaire (images provenant d'un dispositif analogique) ou perturbé par du bruit.

Recherche sur Google Images :



"And their radial Moiré is"

L'image ci-contre est extraite du site randform.org

Il est possible que cette image soit réduite par rapport à l'originale. Elle est peut-être protégée par des droits d'auteur.

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La version présentée ici à été extraite depuis cette source le 16/11/2010.
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